vendredi 13 juillet 2012

Vacances au pays où les cimetières sont des jardins ...

A Morte di Filicone 
Impiecà vogliu la musa
Per fanne duie canzone
Mi ritrovu indu le poghje
È dimoru in Albitrone
Ne sò tristu è scunsulatu
Chì ghjè mortu Filicone

Quand’elli a senteranu
I cacciadori in Casinca
Ch’ell’hè mortu Filicone
À lu pede d’un listinca
N’hè mortu bell’onoratu
C’un cingnale capu à capu

L'aghju fattu un cimiteriu
Tuttu cintu à muraglione
Nunda chè di maestranza
Ci aghju qualchì pataccone
Senza cuntà l'altru restu
È po tutte le curone

L'aghju fattu a so cascia
Tutta piena di pattume
Po ripostu lu so capu
Nantu à un cuscinu di piume
Ùn vogliu fà cum'è quelli
Chì li si lampanu in fiume 
 (Anonyme)


Jean-Philippe Poli, Olmetta di Tuda (Lien)

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Tombe dans le Cap Corse

C'est une bien drôle de chanson, en Corse on appelle ça "Lamentu" ... L'histoire est simple, je ne vais pas tout vous traduire, elle raconte l'amour d'un homme pour son chien qui vient de mourir.... Le très surprenant c'est la fin... l'homme raconte qu'il a, pour enterrer son chien, construit un petit cimetière entouré d'un muret "L'aghju fattu un cimiteriu, Tuttu cintu à muraglione" et il termine en disant qu'il n'a pas voulu faire comme ceux qui jettent leur chien dans le fleuve "Ùn vogliu fà cum'è quelli, Chì li si lampanu in fiume" Avouez que c'est du costaud ! … Encore une fois, il y a du Colomba dans l'air ... Cette confrontation violente entre le primitif et l'aspiration à la civilisation. Quoi de plus barbare que de jeter son chien mort dans une rivière ?.... Vous me permettrez encore une fois une légère dérive hortésienne ... L'auteur nous dit "je ne suis pas un primitif, j'enterre mon chien "... mais ce chien, il l'enterre dans un jardin ... Qu'est-ce qu'un espace entouré d'un mur sinon la plus simple expression du jardin ? Les cimetières familiaux en Corse sont des jardins le plus souvent clos ... des petits jardins que les "parents" entretiennent, plantent d'un arbre ou autres ... Si la Corse est connue pour avoir parmi les plus beaux paysages du monde... on ne peut pas dire qu'elle se distingue pour ses jardins ... Il y a des potagers, des vergers, avec des techniques et des usages propres à la Corse, certes... mais on ne peut pas dire qu'il y ait une "culture jardin" comme dans le reste de l'Europe … Ce qui est là aussi surprenant tant le Corse est attaché au lieu, au topos ... le lieu où il est né, où il vit, d’où il vient etc. ... Mais alors, pourquoi attendre la mort pour s'installer dans un jardin ?… Un retour au Paradis ? La recherche d'un monde en paix ? Les Corses auraient-ils une version bien à eux du Locus terribilis et du Locus amoenus  ? ... Francesco Colonna serait-il Corse ? ...  Curieux ... Bien curieux cette histoire, il va falloir gratter un peu … 



2 commentaires:

  1. Je découvre ce bel article et je pense à ce paragraphe que j'ai lu dans l'ouvrage de Rolf Toman "Parcs et jardins en Europe, de l'Antiquité à nos jours" qui dit : "La présence de plantes dans le cimetière, comme indiqué sur le plan de l'abbaye de Saint-Gall, ne suffisait vraisemblablement pas à faire passer celui-ci pour un verger, mais il est indéniable qu'une certaine configuration horticole était appliquée au lieu d'inhumation des morts. L'idée de réellement présenter le cimetière comme un verger, et non de simplement le planter d'arbres, remonte elle aussi à l'Antiquité : des archéologues ont découvert que le cimetière Kerameikos d'Athènes était certainement conçu comme un bois sacré où les morts trouveraient un repos plein de délices. Platon explique avec force détails, dans le douzième livre de ses Nomoi, qu'un homme ayant le mérite de l'État jouit du privilège d'être enterré sous un tumulus planté d'arbres."
    Mes chiens retourneront, eux aussi, à la terre pour nourrir des nouveaux cycles de vie.
    Merci pour ces réflexions.
    Amitiés,
    Daniel Larralde del Solar

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